Foutu mistral.
Il me condamne à des jeux de carrousel.
Me voici qui tourneboule sans même prendre de la hauteur.
Et tous ces flâneurs… Comme ils se moquent de mes contredanses, de mes bruits de papier froissé! Ils sont venus pour la vue. Il n’y en a que pour le quartier qui m’a vue naître, la Belle de Mai.
C’était il y a vingt-cinq ans.
Jolie brune en blouse bleue, je frimoussais pour la CGT.
Puis tout se précipite. L’imprimerie Rue Clovis est en rade de papier. De grosses mains me chiffonnent et on m’envoie aux oubliettes d’un coup de pied à la Zidane.
Crise de la quarantaine.
J’attends maintenant mon coup de balai.
J’ai déjà tout rêvé : ma descente en ascenseur, ma croisière en skate et même comment un habitant scrupuleux me confiera aux archives municipales. En vrai trophée chimérique.
Mémoire de papier.
Les regards se poseront à nouveau sur moi.
Je serai allongée bien à plat, auscultée, examinée à la loupe. Mon histoire sera diagnostiquée, répertoriée et racontée.
J’aurai une biographie.
En attendant demain.
Je végète entre des mégots venus de loin. J’attends d’être reléguée dans le passé.
Je hante ces lieux qui ne sont plus les miens et que les nouveaux dé-réclament La Friche.
Histoire créée au détour d’un atelier organisé par decouverte-urbaine.org et villa-lamarelle.fr.