Information et nouveaux médias

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VÉRIFIER SES INFORMATIONS

 

Chaque internaute peut aujourd’hui participer à la fabrication et à la diffusion d’une information. L’usage des réseaux sociaux comme Facebook et Twitter amplifie largement ce phénomène. Résultat: il devient difficile de retrouver le parcours d’une information. La soif du scoop ne doit toutefois pas amener les journalistes à négliger l’identification de leurs sources d’information.

TROIS EXEMPLES DE DÉRIVES JOURNALISTIQUES

 

1. Ce premier exemple montre l’importance de remonter l’information et de citer la source originelle, avec un lien si possible pour assurer la traçabilité de l’information.

Il s’agit d’un fait divers: un sosie de Gainsbourg poignarde un sosie de Johnny Hallyday. Une première rédaction sort l’info qui est reprise par une autre rédaction, puis par l’Agence France Presse (AFP). La source initiale n’est pas mentionnée par l’AFP, l’information acquiert alors le statut d’une « information AFP » pour les rédactions abonnées. Lorsque la source d’origine modifie l’information de départ, tout le monde n’en aura pas connaissance. Un lien vers la source d’origine aurait limité les dégâts en assurant la traçabilité de l’information.

 (détails: http://www.themediatrend.com/wordpress/2011/07/27/incoherences/)

 

2. Ce second exemple illustre le danger des réseaux sociaux comme viviers de fausses informations. Une « breaking news »,même retweetée des centaines de fois, n’en devient pas véridique.

Twitter a été inondé de rumeurs, d’anciens clichés et de montages photos lors du passage du cyclone Sandy à New York. CNN a repris l’alerte du Twittos @ComfortablySmug (6000 abonnés) mentionnant l’inondation de la salle des marchés de Wall Street avant de démentir l’info à l’antenne : il s’agissait d’une fausse information.

breaking

(source : www.buzzfeed.com/jackstuef/the-man-behind-comfortablysmug-hurricane-sandys#.diobjJD8a8)

 

3. Ce troisième exemple rappelle l’importance du choix des sources, même dans la course au « live ». Un flux continu d’ « informations au conditionnel », c’est-à-dire d’informations non vérifiées avant diffusion n’offre pas une qualité journalistique.

En mars 2012 à Toulouse, les journalistes ont attendu plus de trente heures l’arrestation de Mohamed Merah. Leur empressement à sortir le scoop n’en était que redoublé. BFM s’est laissée prendre au piège, s’appuyant sur une source parlant au conditionnel. Pendant plus de vingt minutes, elle a éloigné ses auditeurs des faits, puis le journaliste lâchera le légendaire « Je vous confirme mes informations contradictoires ». 

(source : www.telerama.fr/medias/toulouse-quand-bfmtv-confirme-ses-informations-contradictoires,79217.php)

QUELQUES OUTILS POUR ÉVALUER SES INFORMATIONS

 

PREMIÈRE ESTIMATION DE LA SOURCE

 

Sur internet comme ailleurs, il convient de s’assurer de la qualité de ses sources. Le lieu d’émission de l’information (géolocalisation), le style du site, du blog ou de l’auteur ou encore les photos associées à l’information constituent les premiers indices à prendre en compte.

Par exemple, un président tunisien qui twitte en italien ou depuis la Chine devrait mettre la puce à l’oreille.

Afin d’empêcher l’usurpation d’identités, Twitter offre la possibilité d’afficher une virgule bleue sur le profil, signifiant que le compte est « certifié ».

Prenons cette fois l’exemple du président des États-Unis: Who’s who?

Annexe1_Obama_Twitter

Difficulté supplémentaire: les journalistes sont très présents sur les réseaux sociaux, mais ils n’y sont pas toujours multiplicateurs d’informations vérifiées. De plus en plus, les rédactions demandent donc à leurs journalistes de préciser sur leurs profils que leurs propos dans les réseaux sociaux n’engagent qu’eux-mêmes. Cela signifie donc que même les informations délivrées dans les réseaux sociaux par des journalistes doivent être vérifiées. L’exactitude de l’information « ne coule pas de source », même si elle vient d’un journaliste.

Profils de « journalistes twittos » :

 Annexe2_journalistes_twittos

À PROPOS DES JOURNALISTES DANS LES RÉSEAUX SOCIAUX

 

L’American Society of News Editors (ASNE) qui regroupe les directeurs des principaux journaux américains, a publié en 2011 un guide des dix meilleures pratiques sur les réseaux sociaux à destination des journalistes:

[Téléchargeable en anglais: http://asne.org/Files/pdf/10_Best_Practices_for_Social_Media.pdf]

 

Le journaliste et professeur Marc Mentre a traduit sur son blog Mediatrend les dix conseils de « best practice » de l’ASNE :

1. Les règles éthiques et déontologiques traditionnelles s’appliquent également sur les réseaux sociaux.
2.Tout ce que vous écrivez est public. Il faut l’assumer.
3. Dialoguez avec les lecteurs, mais faites le professionnellement.
4. Les breaking news doivent être d’abord publiées sur le site du média et non sur Twitter.
5. Méfiez-vous des conflits d’intérêts.
6. Vérifiez ce que vous avez vu ou lu sur un réseau social.
7. Identifiez-vous toujours comme un journaliste.
8. Les réseaux sociaux sont des outils, non des jouets.
9. Soyez transparent et corrigez toujours rapidement vos erreurs lorsque vous en faites.
10. Conservez les délibérations internes confidentielles.

ENVIRONNEMENT DE LA SOURCE

 

Il s’agit cette fois de l’application du dicton « dis-moi qui sont tes amis et je te dirai qui tu es ».

Le nombre de visiteurs d’un site ou d’un blog, le nombre d’amis Facebook ou d’abonnés Twitter peut constituer un premier indice sur la véracité d’une source. L’analyse plus précise de l’environnement d’un site, blog ou profil permet d’affiner son estimation de l’information. Voici quelques outils pratiques:

  • http://urlmetriques.co/: estime la popularité d’un site et mentionne les pays/villes où le site est le plus populaire ainsi que l’emplacement du serveur.

  • http://mentionmapp.com/ permet de visualiser les connections d’un twittos avec les personnes et hashtags (on n’a pas encore donné de définition de hashtags. Peut-être, il faudrait une petite phrase d’explication) mentionnés le plus souvent dans ses derniers tweets.

[Autre post sur « comment contacter une source sur Internet? »]

 

CONTEXTE DE LA SOURCE

 

Il n’est pas toujours anodin de connaître la date de création d’un site ou d’un profil, la reprise de l’information sur d’autres sites ou d’autres profils, etc. Des effets de calendriers, de réseaux, etc. peuvent aller jusqu’à démentir la véracité d’une information. À ce titre, quelques outils bien utiles:

  • topsy.com fait partie des moteurs de recherche permettant de fouiller dans les „archives“ des réseaux sociaux.

ZOOM SUR LES PHOTOS

 

Les photographies font partie des informations circulant sur internet, le plus souvent sans mention de la source (auteur de l’image, date de la prise de vue). Certains outils aident à rétablir la traçabilité des photographies en permettant de rechercher les images similaires „scannées“ par google:

 

EXERCICE

 

taxi inondations source

Restons au chapitre des inondations avec cet article de „Tunisie Numérique“: le taxi a-t-il vraiment été photographié lors des inondations de novembre 2012 à Tunis? Quelle est la source de cette photo (photographe, lieu)?

[Réponse dans le post Le coup du taxi pour trouver la source des inondations]

 

Une nouvelle mode journalistique? LE « FACT CHECKING »

 

La vérification des informations, une règle vieille comme le journalisme, est qualifiée de « fact checking » depuis l’essor d’Internet et l’accès à l’imagerie satellite ainsi qu’aux grandes bases de données.

« Le fact checking (fr. la réenquête) est un anglicisme désignant une démarche visant à valider l’exactitude d’affirmations, d’informations, ou de faits allégués dans un texte ou discours oral. Cette opération est effectuée par des fact checkers (réenquêteurs) qui sont des personnes vérifiant que les assertions d’un texte ou d’un discours sont vraies. Cette pratique s’applique le plus souvent aux déclarations des hommes politiques (…). (source: https://fr.wikipedia.org/wiki/Fact_checking)

Le « fact checking » se développe notamment de manière collaborative. Wikipedia et d’autres wiki constituent des exemples de „fact checking“ participatifs.

En France, plusieurs sites sont devenus des références en matière de « fact checking » :

  • http://desintox.blogs.liberation.fr : ce blog créé sur le site de Libération fait l’objet d’une chronique sur ARTE à 20h05, du lundi au vendredi. Désintox se veut un « observatoire des mensonge et des mots du discours politique »,

 

Licence Creative Commons

Ce contenu est mis à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution – Pas d’Utilisation Commerciale – Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International.

Ce contenu a été conçu pour un manuel DWA/IPSI sur les pratiques journalistiques lors de la couverture d’élections (Tunis, avril 2013). Le contenu d’un autre chapitre est également disponible sur le blog: « comment contacter une source sur Internet? »

Le contenu est également disponible sous forme de PDF sur slideshare:

 

 

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